Tous tes espoirs, que tu n'te sentes un peu partout, étranger - Terenz

J'existe pas

Tu m'remarques pas

T'en as rien à foutre de moi


Des allégations sommes toute assez crues et pourtant criantes de vérité.

On pourrait résumer la vie par un contexte familial tourmenté et déprimant, à vrai dire, pas terrible à raconter vu que Terenz n'est pas du genre à vouloir faire pleurer dans les chaumières. Ce passé est là, il l'a vécu et c'est tout.

A-t-il eu une enfance malheureuse ? Question de point de vu.

Certains diraient qu'avoir vécu dans un environnement de faste en mangeant à sa faim tout en étant entouré d'un certain nombres de personnes à son service est tout à fait agréable.

Matériellement parlant, oui, c'est confortable.

D'autres diraient que vivre sans mère et avec un père absent qui délègue toute responsabilité à ses employés est une souffrance. À se demander si son propre père te déteste ou ne te considère à peine plus important que sa table à manger en marbre tant les nourrices ont succédé sans prendre en compte tes sentiments.
Que penser quand la solitude est pesante ? Que penser quand celui-ci ne s'intéresse qu'à la réussite scolaire qui n'est jamais suffisante quoiqu'il fasse ?

Il existe une dualité certaine dans cette enfance et l'explication sur les difficultés futures que Terenz éprouvera.

Mais tout n'était pas complètement noir ou blanc. Si l'on devait nuancer ce passé, il serait d'un gris neutre.
Un gris assombri par le père qui en voulait peut être à son fils d'avoir tué sa femme à la naissance ou de ne pas être ce qu'il attend de lui car il devrait succéder à sa famille, qui sait ? Impossible à dire quand le tuteur ne se confie jamais.
Un gris qui, pourtant, s'illumine par la présence d'un petit être qui fut l'univers entier du brun une bonne partie de son existence.

Étant plus jeune, notre brute de service ne l'eût pas toujours été. C'était même, bien au contraire, un petit bout très calme et obéissant. Peut être trop ? Au point d'en être silencieux et distant avec ses camarades de classe. Jamais rieur. Jamais souriant.
Tout ce qu'il faisait, il le faisait pour obtenir de l'attention avant de se plonger dans une grande détresse, à s'accabler sans cesse d'une faute qui n'existait pas.

Une détresse qui fut tempérée un jour ensoleillé dans le jardin.
Un bruit était venu perturber la relative tranquillité des lieux, faisant se relever le mioche pour se diriger vers la source du dérangement : un buisson mouvant.
Ce qu'il vit à l'intérieur, n'était autre qu'un chiot.
Blessé à la patte et coincé sous un tas de branches. Et c'est tout naturellement Terenz qui le détacha puis le ramena devant l'une de ses nourrices qui l'aida à soigner la petite bête.
La chose semblait si faible, si fragile et si affaiblie… Qui aurait cru qu'une fois guéri, l’animal a l'air pataud fut aussi adorable qu'énergique, de quoi réussir à amadouer l’enfant solitaire, si bien qu'il l'avait gardé avec lui sans se demander d'où la créature venait.
Ensembles, ils passèrent de très bons moments, d'ailleurs personne n'eut jamais réclamé l'animal et pour rien au monde le garçon n'aurai abandonné la petite chose. Terenz pouvait aisément dire que sa seule famille était ce mignon petit chiot.

Son père n'avait rien dit à ce sujet, il se souciait peu du nouvel occupant de la maison : tant que son fils travaillait assidûment, il ne lui retirait pas l'animal.
Les années passèrent d'ailleurs a une allure folle et le compagnon de notre protagoniste, tout comme ce dernier, grandirent bien vite sous le sombre regard du temps.

Là où notre brute vira à plusieurs degrés à l'adolescence pour se mettre à provoquer son tuteur pour le faire réagir.

Frapper d'autres élèves ? Bah, c'est normal à son âge.
Insulter un professeur ? Bah, faut bien que jeunesse se passe.
Rentrer tard le soir après le couvre-feu ? Bah, c'est pas bien grave.
Traîner dehors avec des délinquants et se battre ? Bah, qui s'en fout ?
Rejoindre des inconnus en pleine rue ? Bah, Il sait ce qu'il fait.
Se mettre en danger consciemment ? Et alors ?
Ramener de mauvaises notes ? Oh là non par contre, c'est pas possible. S'il veut revoir son chien, va falloir faire mieux que ça.

Père de l'année ! Autant dire que sa scolarité a côtoyé l'expulsion et les rapports de comportement tandis que papa sortait la carte pour acheter le silence de l'école de richou.

Le fils de Mr Michaelis était difficile à gérer pour l'établissement mais tempéré par la menace de séparation avec son canidé.
Toutefois.. cette situation ne dura pas longtemps...

Le seul plaisir de Terenz en rentrant des cours, des heures d'études ou d'autres activités diverses qui ne l'intéressait pas plus que cela (quand il ne séchait pas), était d'imaginer la queue frétillante et la joie dans le regard de son chien à la porte.
Que de bons souvenirs.
Des souvenirs depuis que le vaillant compagnon n'est plus. Il n'avait que seize ans quand son ami d'à peine sept années a rendu l'âme.

On peut dire que cette mort a achevé de faire exploser une bombe à retardement quand une discussion avec son père le soir même tourna au vinaigre. Terenz et ses notes exécrables, il n'avait que ça à la bouche après avoir ignoré la triste annonce du jour. La mort de l'animal lui aurait épargné la tâche de lui enlever lui-même.

Le ton était donc monté. Les deux s'étaient séparés de table dans un silence mortel.

Maintenant que son compagnon n'était plus, que lui restait-il ? Plus rien.
Entre ses mains, il avait sur un coup de tête attrapé un cutter avec une intention bien claire. Celle-ci avant qu'elle ne soit interrompue par un bruit à sa fenêtre.
En s'y penchant, il vit la tête d'un mec qu'il avait rencontré quelques semaines auparavant, un universitaire qu'il pouvait considérer comme un ami.

Alors les engrenages s'alignèrent, l'adolescent se barra par la fenêtre, passa une soirée à boire avec lui et ses potes louches.
Une soirée soldée par un Terenz qui prit le premier bus pour quitter New York, l'intention ferme en tête de ne jamais revenir chez lui.

Deux années à errer avant de s'arrêter dans le littoral du Maine, au niveau d'une petite ville où il retrouva quelques têtes familières chez lesquels il squatta un moment, passant d'appart en appart ou bien à dormir dans les rues.
Il a un souvenir mitigé de cette dernière année puisque là-bas se trouvait une personne bien particulière.
C'était une pote de son meilleur ami de l'époque et une jeune femme qu'il haïssait au départ. Elle avait d'ailleurs une situation très similaire à la sienne.
Et ce qui était un dédain mutuel entre les deux est devenu une rivalité, puis des sentiments naissant pour Terenz quand un soir un peu trop éméché, il s'est réveillé dans le même lit que la rouquine.

Depuis, tout était compliqué avec elle. Cette crinière rousse semblait le considérer comme un ami, lui la tolérait comme il pouvait sans comprendre qu'il avait des sentiments à son égard.
Et ce jusqu'à ce qu'un soir, elle se confie à lui. Elle était amoureuse de son meilleur ami.
Lui avait tu tout autre sentiment jusqu'à ce que les deux finissent ensemble.

La cerise sur le gâteau ?
Se voir tenter de quitter la ville pour encaisser le choc et se faire choper par la police qui avait enfin retrouvé le fiston disparu.

La brute de service n'avait aucune envie de revoir la trogne de son père qu'il exécrait. Son avis ne comptait de toute façon pas.
Sans lui accorder le moindre regard ou la moindre parole, Monsieur Michaelis eut comme merveilleuse initiative d'envoyer son môme désobéissant loin d'ici, dans le pays de ses grand-parents paternel, à Black Lake. Là où il serait sûr qu'il comprendrait la teneur de ses actes, ce qu'il pourrait devenir s'il continuait dans cette voie.

Quoiqu'il fasse, il n'a jamais eu le choix auprès de lui. Il serait bien tenté de se barrer de nouveau, mais il est encore secoué par tous ces évènements avec son amour à sens unique, alors il est resté docile un temps. Avant de redevenir parfaitement exécrable avec le personnel de cet endroit. Pourquoi pas ?